Terminator : Une Plongée au cœur de l'inceste (4900 mots)
Parfois, il est difficile d’être synthétique. Toujours en fait. Que c’est dur la synthèse.
Ce qui est dur également, c’est de savoir si une explication facilite la compréhension d’une idée ou si au contraire on vient de tout rendre encore plus compliqué et confus.
Bonjour.
J’ai posté récemment un article sur Terminator qui disait que Kyle Reese était le fils de Sarah Connor et que John Connor n’existait pas dans Terminator premier du nom.
Le problème c’est qu’en le rédigeant, alors que je pensais développer quelques détails pour démontrer ces deux éléments qui, tout-de-même, signifient qu’à la fin du film nous assistons à une scène de sexe incestueuse, je me suis rendu compte que Terminator était intégralement focalisé sur l’inceste ; chaque seconde de ce film est une exploration minutieuse de l’histoire d’une mère incestueuse qui va violer son enfant.
Je me retrouve donc à rerédiger cet article d’une manière plus synthétique et compréhensible, j’espère.
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Imaginez un film qui raconterait au travers d’une métaphore guerrière, l’histoire d’un petit garçon déjà orphelin de son père dont la mère va mourir d’un cancer. Pour une raison ou pour une autre sa mère lui a toujours dit qu’il était son « petit chevalier » et nous nous retrouvons donc avec une histoire à la Tolkien.
Le héros est un chevalier de l’âge de la princesse. Ils ont le même âge car psychologiquement, l’enfant a pris la place de son père et se ressent comme l’homme de sa mère, et sa mère est donc princesse plutôt que reine et également plus jeune qu’en réalité.
Une armée de monstres plutôt indifférenciés (cellules cancéreuses) attaquent le magnifique château de la princesse. Ce château c’est la maison, le lieu de la sécurité qui est plein de passages secrets et de moyens d’accès acrobatiques dignes d’un parcours d’accrobranches.
Alors que les vagues d’ennemis ne cessent d’attaquer, la princesse accepte peu à peu la conclusion inévitable : elle doit mourir. Le ciel s’assombrit de plus en plus à mesure que la défaite à venir se fait évidente. La pénombre c’est la fin de l’amour. Sans la princesse, il n’y a plus de lumière, plus de soleil, plus de chaleur, plus de vie dans le monde de l’enfant. Les mers (liquide amniotique) s’assèchent.
Cependant pour une raison magique quelconque, la mort de la princesse entrainerait la fin du combat et le chevalier qu’elle aime de toute son âme pourrait survivre, car c’est seulement elle que les méchants veulent. Elle le lui explique et évidemment il refuse d’accepter un tel développement, mais elle lui dit de regarder autour de lui, que s’il baisse les bras, il emportera d’autres personnes avec lui. Un autre guerrier ? Une autre guerrière, des personnes qui le soutiennent, je ne sais pas. Bref, des membres de sa famille, ou peut-être une petite fille dont la mère elle-même est atteinte du cancer et qu’il a rencontré à l’hôpital.
On peut parfaitement imaginer que le film entrecouperait les scènes métaphoriques avec celle de la réalité atroce, ou au contraire qu’il ne le ferait justement pas. Il pourrait être purement métaphorique et ne jamais nous indiquer que le chevalier amoureux de la princesse c’est en fait son enfant et que s’ils ont le même âge c’est juste métaphoriquement ou qu’il est question d’un cancer et que l’apocalypse qui menace c’est la fin de l’affection existentielle de la mère etc…
Terminator c’est ça. Je sais, je viens d’expliquer lourdement ce qu’était une métaphore au lieu de simplement dire que ce film en est une. Seulement, Terminator est la métaphore sinistre d’une relation incestueuse et j’aimerais assez mettre en avant que c’est un processus d’analyse qui me fait regarder les choses sous cet angle et pas une sorte de morbidité. Parce que bon, Terminator va vraiment jusqu’au plus profond du malsain.
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Si Kyle ne couche avec sa mère qu’à la fin du film l’aspect incestuel est toujours présent dans la relation qu’ils entretiennent. Voici quelques extraits d'un article sur la question qui me permettra de bien rendre explicite le lien entre les éléments du film et ceux d’une relation incestuelle :
La mère, peut être qualifiée de co-dépendante émotionnellement et montre les symptômes de dépression chronique […]. Elle demande continuellement à son enfant de combler ses besoins […]. La première demande est certainement l’exigence de loyauté. L’enfant doit en permanence répondre aux besoins émotionnels, psychologiques ou physiques de sa mère sans égard pour ses propres besoins. En fait dans ce type de relation, la mère utilise l’enfant pour servir ses propres besoins narcissiques et comme défense à ses angoisses d’abandon et de solitude. Il est celui sur qui elle peut compter en tout temps, ce qui n’est pas le cas du père. La mère est malheureuse dans son mariage et se comporte en martyr (schéma de la victimisation). Le père est généralement absent de la maison (émotionnellement et /ou physiquement) et la mère fait de l’enfant son partenaire, conjoint symbolique ou réel. Toutes les tentatives de la part de l’enfant pour se séparer de sa mère sont punies par de la violence psychique ou psychologique. Les abus psychiques et/ou physiques sont accompagnés de comportements perverts de la mère qui visent à humilier le garçon en lui faisant porter la « faute » des désirs, fantasmes et/ou relations sexuelles.
Conséquences sur le fils :
Sentiment de grande solitude et d’abandon, culpabilité, honte, peur de l’intimité perçue comme de l’attachement, parentification, besoin de se sacrifier pour les autres, estime de soi faible, incapacité à dire non et à se protéger.
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Le film explore la relation incestueuse sous trois angles :
1.L’Aliénation psychologique de l’enfant : la guerre futuriste humains/machines.
2.La Relation incestueuse : la traque de Sarah par le T800 et sa protection par Kyle.
3.La Cause de cette relation : la perception que Sarah a de sa libido.
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La guerre contre les machines est une représentation métaphorique de la manière dont la psychologique perturbée de Kyle Reese lui fait percevoir le monde.
Sarah a élevé son enfant à répondre aux besoins de sa mère sans égard pour ses propres besoins. Kyle a donc une conception du bien et du mal et de l’amour fondée sur l’idée du sacrifice de soi. Un être humain aimable ne doit penser qu’aux autres et le moindre désir individuel fait basculer du côté de ce qui n’est pas aimable.
Les machines sont donc métaphoriquement, et de manière assez contre-intuititive je trouve, l’incarnation des individus qui suivent leurs envies. Les robots que Kyle combat sont simplement les humains qui acceptent de vivre pour eux-mêmes. Comme il ne conçoit pas cette manière d’être, il la perçoit comme gratuite, le résultat d’une insensibilité absolue et d’un pur désir de violence vis-à-vis des autres.
Le métal, l’absence de lumière naturelle au profit d’une lumière artificielle bleutée, traduisent l’absence d’amour et de chaleur. Contrairement au métal, la chair a une température et est vivante. Le combat du futur est un combat entre vie et mort au sens littéral : l’un des deux camps est fait de matière inerte. Kyle ressent le monde comme lui étant absolument étranger. Il ne se bat pas contre d’autres humains, il se bat contre quelque chose qu’il ne peut pas comprendre et qui n’a aucun lien avec lui car dès lors qu’il reconnaîtrait l’humanité d’un désir propre, ce que représentent les machines, il devrait également regarder en face la présence de tels désirs en lui et se rendrait par extension indigne de l’amour maternel.
La guerre est le signifiant du combat perpétuel que Kyle mène pour ne pas être lui-même, pour ne pas devenir une machine. Le pire ennemi de l’enfant sous l’emprise d’une mère incestuelle c’est l’insouciance qui le fait glisser vers son soi* réel interdit. *Vocabulaire de Carl Jung.
La seule forme de désir propre qu’il s’accorde est celle qui lui fait se conformer au désir maternel. Il prend du plaisir à combattre les personnes qui osent suivre leurs désirs. Ainsi, bombes et mitraillettes, extensions mécanisées de son corps, deviennent le centre de son individualité. Son rôle, soldat, est également marqué par l’oubli de soi, il suit des ordres, il a une mission. Il ne fait rien pour lui-même.
Un jour cependant, il va faire l’expérience d’un désir propre qui va bouleverser son existence : Il va être attiré par une femme. Ce n’est pas un hasard que ça soit sa libido qui le fasse venir au monde en tant qu’individu. Elle est l’un des désirs les plus forts, les plus difficilement contrôlables et elle a pour particularité de pousser vers l’autre. Elle a donc un potentiel subversif important (Là, la société de consommation se marre).
La jeune femme soldat qui est également attirée par Kyle, meurt alors qu’elle jette sa grenade : elle ne parvient plus à rejeter la part « mécanisée » d’elle-même. Elle est touchée par un laser et disparait entièrement. Cette disparition magique va dans le sens du changement de camps, mouvement psychologique total, que sa mort représente.
La tristesse et la frustration font sentir à Kyle qu’il n’est plus tant convaincu d’être du côté des humains. Il monte dans un véhicule et se rapproche donc des machines tout en prétendant augmenter son investissement contre elles. Évidemment, il se crashe au bout de quelques minutes et se retrouvent confronté à la réalité : il est rongé par les flammes de la passion et du désir. Il se réveille en sursaut en 1984 et la première chose qu’il voit est une pénétration mécanisée.
Prendre conscience de sa libido lui fait prendre conscience de l’impossibilité de fusionner avec les désirs maternels. Il sait maintenant qu’il ne peut pas être le petit ange qui ne vit que pour maman. Il devient secrètement persuadé de ne plus être digne de l’amour maternel. Apparait alors le T800.
La machine hybride, le cyborg, humain à l’extérieur, robot à l’intérieur. C’est le terminator qui va donner la victoire aux machines. Il parvient à infiltrer le bunker sous-terrain dans lequel Kyle se sentait en sécurité et massacre tout le monde. A noter, on ne voit dans ce bunker que des personnes qui n’imposent par leur désirs au monde : victimes, enfants, soldats.
Le terminator a les yeux rouges, signifiants d’une intériorité démoniaque. C’est la manière dont Kyle se perçoit maintenant à cause de sa libido. Il regarde la photographie de Sarah prendre feu : ses désirs détruisent « maman. » Il a perdu le combat contre les machines.
"Maman laisse-moi tranquille je dois ranger mon cartable" "Tu auras le temps plus tard Kyle, regarde-moi, maman a quelque chose à te dire."
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Parce que la mère incestueuse utilise son fils pour se soigner, l’enfant se sent une responsabilité envers elle. L’espace qu’il s’accorde est directement lié à l’état psychologique de sa mère qui évidemment se sentira toujours plus mal que lui. Elle peut aussi bien être fatiguée, malade, malheureuse, elle est toujours à plaindre et le moment pour l’enfant de commencer à penser à son propre bonheur est systématiquement repoussé.
Cette dynamique de victimisation conditionne l’enfant à ressentir le fait de penser à lui comme une agression faite à sa mère, un désir secret de la tuer. Il apprend donc à culpabiliser de vivre et passe sa vie à s’amender, à payer sa dette.
Ainsi, lorsque Kyle constate l’existence de sa libido, il la ressent immédiatement comme une menace pour la vie de sa génitrice. L’apparition de l’individualité de l’enfant déclenche le voyage dans le temps/renaissance. Kyle innocent et Kyle/T800 apparaissent nus en position fœtale en 1984. L’un veut protéger sa mère de cette nouvelle force qui a pris possession de lui, l’autre veut coucher avec elle.
Oui, le T800 veut tuer Sarah, mais tuer dans le film, c’est simplement suivre les désirs qui nous poussent vers d’autres personnes. Et le T800, c’est Kyle. On comprend donc mieux l’usage de la métaphore ici, car ce qui est dit c’est qu’une part de l’enfant victime d’inceste désire sa mère. Les flemmes qui détruisent la photo de Sarah Connor étaient autant la destruction que la réorientation de la libido du héros.
Par contre, de l’autre côté l’enfant qui voudrait échapper à son influence veut à tout prix éviter la catastrophe. Il veut s’intéresser à ce qui a fait de sa mère, la psychopathe qu’elle est mais dans l’espoir de la soigner pour qu’elle le laisse tranquille. Il s’approche en médecin.
La course-poursuite de Terminator est donc la lente glissade vers l’acte sexuel entre une mère et son fils qu’une part de l’enfant fait tout ce qu’elle peut pour empêcher pendant que l’autre le fait glisser lentement vers le vagin dévorant qui n’attend que ça. Le sens métaphorique du meurtre de la première Sarah Connor est la destruction du rôle de mère. Puisque le T800, c’est la part de Kyle attirée par Sarah, il détruit en premier le lien mère/fils qui empêche l’acte incestueux. Lorsqu’il roule sur le jouet, il met fin au monde de l’enfance.
Cette dynamique est présente dès le départ : Sarah ne veut pas échapper au Terminator.
Lorsque dans le nightclub, il lui braque son pistolet sur le front, elle ne réagit pas d’un poil. Elle attend patiemment de se faire tuer. De même que lorsque Kyle lui sort sa réplique culte « viens avec-moi si tu veux vivre* », elle ne le suit pas et il doit hurler « COME ON ! » pour qu’elle se réveille.
*”Come with me if you want to live.”
Puis dans la voiture, lorsqu’il lui demande si elle blessée, elle joue les pauvres femmes terrorisées et lui répond « ne me faites pas d’mal ! » comme s’il était son agresseur. Il me semble que lorsqu’il l’invite à le suivre, son argument c’est quand même « je vais te protéger. » Elle vient de passer la soirée à fuir un tueur de Sarah Connor(s) qui est finalement parvenu à la retrouver et qui allait lui faire sauter la tête dans un lieu public, ce qui était censé la protéger selon la police, c’est uniquement grâce à Kyle qu’elle est en vie mais elle se conduit quand même comme s’il représentait une menace et qu’il lui faisait peur. Il a risqué sa vie pour elle ! L’attitude ingrate de Sarah est violente et absurde. Et si l’on s’imagine qu’elle réagit comme ça parce qu’elle est sous le choc, elle ne lui fait pas pour autant des excuses plus tard ni ne le remercie jamais pour son intervention.
Assez maladroitement, Kyle lance « c’est très important de vivre » et elle répond immédiatement « c’est pas vrai… » (this isn’t true), laisse un petit blanc puis enchaine sur le T800 qui s’est relevé plusieurs fois après avoir encaissé des coups de fusil à pompes. Sans l’admettre, Sarah dit à Kyle que la vie n’est pas importante pour elle, et que s’il l’a sauvée, ça ne signifie pas qu’elle ait une dette envers lui ou qu’elle ait pour autant envie de se battre pour survivre. Cela peut paraître totalement incroyable, mais le fait est que lorsque le T800 la trouve, elle ne bouge pas d’un poil alors qu’elle sait très bien qu’un mec la cherche pour la tuer.
Ainsi Kyle se retrouve avec une mère qui lui donne la responsabilité de la « sauver » sans même admettre qu’elle veut vivre… et sans lui avouer qu’elle n’est pas en danger de mort. Oui, la menace qui pèse sur Sarah n’est mortelle qu’aux yeux de Kyle. Il pense que la vie de sa mère dépend entièrement de sa capacité à agir de manière désintéressé, s’il laisse s’exprimer le désir qu’il a pour elle, il pense qu’il lui portera une sorte de coup de grâce : elle ne supportera pas de voir que lui aussi, il est comme tous les autres. Il faut se souvenir que la mère incestueuse se victimise pour contrôler son enfant. La menace qui pèse sur Sarah n’est pas aussi importante que Kyle le croit, elle dramatise pour garder le contrôle.
Lorsqu’il voit qu’il ne peut pas obtenir de reconnaissance de la part de celle qu’il vient de sauver, Kyle passe à autre chose. Il donne à Sarah une mission transcendante désintéressée. Elle doit mettre au monde le messie qui sauvera la terre. Je ne saurais trop comment traduire cette initiative en termes « réels. » Kyle essaye de rendre sa mère fière de lui au travers de bons résultats scolaires ou dans des activités extra-scolaires ? Il veut qu’elle s’intéresse à son image « publique » plutôt qu’à lui-même ? Cela afin de mettre une distance ? Peut-être je ne sais pas.
"Ton fils m'a donné un message pour toi: Sarah arrête d'essayer de te taper Kyle et occupe-toi du futur !"
Toujours est-il que l’histoire de John Connor chef de la résistance que Sarah doit entrainer pour que l’humanité gagne la guerre, alors que selon Kyle elle a été gagnée, est un mensonge qui obéît à la logique maternelle. Si les humains, les gentils, sont ceux qui n’ont pas de désir propre, dire à maman qu’elle est responsable de l’humanité et qu’elle doit survivre pour cette raison est l’argument ultime (et également le plus grossier). A cela Sarah répond « Non merci » durant la scène sous le pont lorsqu’elle fait un pansement à Kyle. Une réaction parfaitement absurde elle-aussi puisqu’en gros Kyle ne fait que lui expliquer son futur. Il ne lui impose pas une mission, il lui parle de ce qu’elle a déjà fait spontanément et de son plein gré. Le seul obstacle, c’est le combat contre le T800. Si Kyle parle de cet avenir c’est parce que Sarah profite de sa blessure pour prendre soin de lui. Spontanément, on se dit qu’elle exprime sa gratitude sauf que non. Elle cherche simplement à se rapprocher physiquement et Kyle se dépêche de trouver un argument pour l’éloigner.
Une fois l’idée de la mère héroïque qui prépare le chef de la résistance à combattre les machines passée à la trappe, Kyle se focalise sur le rôle maternel et invente un discours d’encouragement qu’il aurait appris par cœur et qui se terminerait par « Tu dois vivre pour que je puisse exister. » Ce discours très vague n’a aucune raison d’avoir été prononcé puisque John a prétendument vaincu les machines. « Tu dois faire preuve de courage durant les années sombres. Tu dois être plus forte que tu ne peux imaginer l’être. » Il parle comme s’il savait exactement ce que Sarah va traverser, or, ce qu’il peut savoir du parcours de Sarah, elle l’a surmonté sans problème et les obstacles qu’elle rencontre maintenant en 1984 lui sont inconnus. Il ne peut pas avoir écrit un discours qui les prenne en considération. Et pourquoi Kyle répèterait ce discours seulement à ce moment-là ?
L’erreur qu’il commet, ou peut-être est-il simplement dos au mur, est d’aborder indirectement la question sexuelle. Si Sarah doit survivre pour avoir un enfant, alors elle doit faire l’amour à un moment donné. Et qui ferait mieux l’affaire que le beau soldat envoyé du futur par son fils ?
Kyle et Sarah trouvent ensuite un motel pour se cacher. Tous les lieux qu’ils parcourent ensemble sont typiquement des lieux de rencontres amoureuses illicites: boîte de nuit, parking souterrain, cachette sous un pont et enfin motel.
Sarah demande « qu’est-ce qu’on mange ? » (« what’s for diner ? ») à la vue des sacs de provisions qui ne contiennent d’ailleurs rien de consommable. Au travers de cette remarque et de son enthousiasme, elle introduit subtilement la notion de couple. Kyle répond qu’il va fabriquer des explosifs.
Tout comme avec sa copine du futur, les explosifs représentent la libido… ou l’organe sexuel, je ne saurais pas trancher. Simplement lorsqu’il fabrique des explosifs devant Sarah et lui explique comment faire, Kyle s’expose encore un peu plus sexuellement. Du point de vue d’une relation incestueuse littérale, on est devant un exemple de l’enfant qui ne montre aucune pudeur car il n’a pas conscience de la dimension sexuelle de son être ou de celle de sa mère.
Sarah aborde la question de sa vie sexuelle dans le futur. Elle lui demande comment les femmes sont, il répond « de bonnes combattantes. » Il évite de parler de celle qui aurait pu devenir bien plus qu’une combattante, et justement Sarah recentre la discussion sur le sexe et l’amour. Kyle reste totalement immobile et met des heures à répondre à chaque question. Il essaye autant que possible d’éviter la conclusion visible de cette conversation… mais la voit-il cette conclusion justement ? Il finit par admettre qu’il n’a jamais fait l’amour, un aveu tellement étonnant qu’on s’empresse de trouver une raison : la guerre contre les machines est tellement violente et horrible qu’il n’en a jamais eu l’occasion. Sauf que si on réfléchit une seconde, il me semble qu’une telle guerre aurait au contraire pour conséquence de pousser les gens à avoir des rapports sexuels bien plus jeunes.
Bien sûr, cette virginité correspond parfaitement à l’analyse de cet article : Kyle n’a jamais fait l’amour parce qu’il refoule ses désirs qui sont tous avalés par sa relation avec sa mère.
Alors que son attitude passive et pensive commence à donner au spectateur le sentiment que Kyle n’est pas intéressé par Sarah (ce qui est le cas), il finit par lui faire une déclaration d’amour assez inattendue. « Je suis venu pour toi. Je t’aime. Je t’ai toujours aimé. » Il était amoureux de sa photo ? Et ben, c’est dur le futur. Mais au fait, n’a-t-il pas soi-disant rencontré John Connor que durant son adolescence ? Avant ça, Sarah Connor ne représentait rien pour lui.
Cette déclaration qu’il regrette immédiatement, « Je n’aurais pas dû dire ça », il la fait pour dissuader Sarah de continuer dans cette direction : « Maman, je t’aime, je ferais tout pour toi, pitié ne me demande pas plus que cet amour inconditionnel ! », en gros « pitié ne me force pas à coucher avec toi. » Les barres de dynamite qu’il remet dans le sac représente son initiative pour échapper à l’acte, il tente de dissimiler sa maturité sexuelle. Aussi, ce constat de « J’ai voyagé dans le temps pour toi » représente le déni des motivations que Sarah lui imagine. Le voyage dans le temps, comme je l’ai dit au-dessus, est la métaphore de l’implication de Kyle dans des problèmes qui ne devraient pas concerner un enfant. Par exemple penser qu’il est celui qui doit la rendre heureuse. Lorsque Sarah pose sur lui un regard sexué, et que Kyle s’exclame : « J’ai fait tout ça pour toi. Parce que je t’aime » c’est justement pour nier le fait qu’il ait envie de quelque chose de sexuel. Il veut dire « Je ne veux rien, c’était gratuit ! »
Alors qu’il se détourne d’elle pour la vingt-cinquième fois, Sarah rattrape Kyle et lui impose un baiser auquel il finit par répondre après de longues, longues secondes. Et Sarah obtient enfin ce qu’elle veut depuis le début.
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L’une des raisons pour lesquelles je me suis relancé dans Terminator 1 récemment c’était dans l’espoir d’enfin découvrir pourquoi Sarah était développée comme une femme frustrée sexuellement. Au début du film, le copain de sa colocataire lui chuchotte des choses érotiques au téléphone en pensant qu’il parle à Ginger, Sarah ne l’interrompt pas et se tort d’excitation au bout du fil.
Puis, son propre copain prévient qu’il ne sera pas disponible alors que les deux jeunes femmes viennent de passer une heure à se faire belles. Sarah va donc s’égarer toute seule dans une boîte de nuit dans laquelle le Terminator surgit sur une musique qui chante « Je suis chaude comme la braise à cause de toi. » Sans l’intervention de Kyle le T800 tuerait Sarah alors qu’elle attend un partenaire assise à une table. (Danse = métaphore pour acte sexuel).
Ainsi, le trouble que Kyle découvre en voyageant dans le temps, c’est en fait que sa mère meurt d’envie de se faire prendre. Si elle ne réagit pas lorsque le Terminator lui braque son arme sur le front, c’est parce que ce geste n’est qu’une métaphore de l’acte sexuel. Les machines et l’éradication de l’humanité, ne sont que le résultat de la vision altérée de la réalité du petit Kyle. « Oh non ! Un méchant monsieur va faire du mal à maman ! »
D’ailleurs, le méchant monsieur, c’est une part de lui-même puisque le T800, c’est Kyle devenu conscient de sa libido. La poursuite du film, c’est donc d’un côté, la libido de Kyle qui s’est tournée vers sa mère (photo qui brûle) et de l’autre un Kyle qui aimerait échapper à l’ébat incestueux et voudrait que sa mère se sorte les doigts du rectum et se décide à se prendre en main.
Car le problème de Sarah, en plus d’avoir une libido assez importante, c‘est qu’elle pense qu’il est de la responsabilité des hommes de la satisfaire. Elle n’assume pas sa sexualité et reporte sa mauvaise opinion de celle-ci sur eux. Sa libido est dégoutante donc les hommes sont des êtres dégoûtants.
Le traumatisme qui fait qu’elle devient une mère incestueuse, c’est ce qu’elle a fait ce soir-là, alors qu’elle était chaude comme la braise, Sarah est allée en boîte et s’est offerte au premier venu, ce qui a encore renforcé ce sentiment de se salir, qu’elle a encore plus reporté sur les hommes. Une femme qui culpabilise les hommes pour leur attirance pour elle a plutôt tendance à vite se retrouver seule, et je pense que le père de Kyle a dû plier bagage. Peut-être Kyle est-il même le résultat d’une des excursions nocturnes pulsionnelles de Sarah.
Toujours est-il que la manière dont elle l’élève reflète cette envie de faire de lui un petit ange. Elle ne veut pas qu’il devienne comme tous ces porcs qui pensent avec leur pénis.
Le deuxième essai de Sarah ne s'en tirera pas beaucoup mieux pour ce qui est de l'invasion psychologique et de l'absence de gratitude maternelle.
Le problème c’est que priver une personne de son droit de choisir les objets de son désir, c’est l’empêcher de devenir un individu. C’est là le cœur de l’inceste, la mère qui empêche son fils de devenir autre chose que l’extension de sa propre personne et cette dévoration est due au fait qu’elle ne se sente pas exister au niveau sexuel. La place qu’elle devrait prendre au monde en tant qu’individu sexué elle la rejette et recrée spontanément un équivalant asexué qui la pousse à forcer une fusion psychologique derrière laquelle se cache sa libido. Comme sa libido la dégoûte, il devient très dangereux d’essayer de la contenter car un rejet devient exponentiellement humiliant.
Finalement, quand l’enfant développe lui-même des pulsions sexuelles, elle le force à les orienter vers elle, elle ne redoute pas son jugement, elle ne redoute pas le rejet, et elle n’a aucune raison de se dire qu’il l’utilise, qu’il profite d’elle etc… toute la relation a été constituée uniquement dans ce but invisible et inavoué : la soigner de ses troubles sexuels. Climax du film, quand Sarah a acculé Kyle. Il est venu vers elle dans l’espoir de la soigner pour être débarrassé d’elle et pour pouvoir se tourner vers une autre, elle l’a volontairement maintenu dans l’échec et l’absence de mérite pour en arriver au moment il ne lui reste plus qu’une seule possibilité.
La course poursuite qui suit la scène où Kyle et Sarah couchent ensemble est une métaphore de l’acte sexuel. Acte sexuel qui est le dernier rebondissement avant la destruction du Terminator.
Kyle donne le volant à Sarah, c’est elle qui dirige pendant que lui se concentre sur détruire le robot à coup de bâtons de dynamite phalliques. Robot qui est donc aussi invincible « que la libido de Sarah » dans le sens où, vaincre le Terminator signifie que Sarah renonce à satisfaire ses désirs sexuels (peu probable) ou qu’ils ont été satisfaits. Si le Terminator est Kyle c’est parce qu’elle refuse de se tourner vers un autre homme. Le jeune homme est blessé pendant la poursuite. Il ne peut pas s’en sortir indemne, forcément un rapport incestueux ne peut que lui laisser une marque. Il est séparé de Sarah alors qu’elle sprinte, essoufflée, haletante, poursuivie par le T800. Le Kyle innocent se retire de l’équation, il se cache dans une poubelle, pendant que sa part sexuée finit le travail (le T800+baton de dynamite). Le camion explose, c’est l’orgasme, Sarah a eu ce qu’elle voulait, tout est bien qui finit dans l’inceste hourra.
Evidemment, le T800 resurgit des décombres. Il signifie plusieurs choses, comme depuis le début du film de toute façon. En couchant avec Sarah, Kyle a dévoilé à sa mère qu’il était exactement ce qu’elle lui a appris à rejeter. Il apparait donc dans toute sa mécanisation. Le Kyle innocent ne peut plus exister et met fin à ses jours dans une dernière attaque suicide. Mais le T800 toujours debout, c’est également l’idée que Sarah n’en aura jamais assez. Kyle a couché avec elle dans l’espoir de la satisfaire et qu’elle arrête de l’envahir. Or, du côté de la mère, ça n’était que la première de nombreuses fois à venir. Confronté à cette perspective, Kyle se suicide.
Et c’est là qu’arrive alors, l’élément inattendu. Sarah ne sort pas indemne de l’explosion. Sa blessure à la jambe l’empêche de se tenir debout. Elle a perdu sa dignité. Alors que le T800 la poursuit toujours, elle accepte enfin la solution qu’elle avait dès le début mais qu’elle ressentait comme honteuse : la masturbation. En anglais « pousser le bouton » c’est se masturber. Ainsi, si elle reste misandre, elle accepte enfin que les hommes ne sont pas responsables de sa libido, elle seule l’est.