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Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Publié le par Kevin

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Cela ne faisait pas deux décennies que les américains étaient allés sur la lune quand je suis né, et pas une décennie que le SIDA était apparu. De ma vie, il ne m’est jamais venu à l’esprit de remettre en question l’accomplissement d’Apollo 11. C’est uniquement après les attentats du onze septembre que j’ai entendu pour la première fois parler de version non-officielles liées à des événements historiques connus de tous. M’imaginer que les Américains n’étaient pas allés sur la lune pouah ! Moi qui avait grandi avec Tintin Objectif Lune, On a marché sur la lune, j’avais totalement assimilé cet exploit comme la preuve que les humains dominaient l’univers, que l’histoire de l’humanité ne pouvait être qu’aussi naïve et colorée que celle d’un livre pour enfant. Je n'avais jamais remarqué que c'était un drapeau américain qui était censé flotter sur l'astre lointain.

Pourtant, une fois l’idée apparut dans mon esprit, je me mis à remarquer les nombreuses fois où je rencontrais une œuvre qui semblait suggérer que les Américains sur la lune, c’était du flan. Il y a plusieurs documentaires sur le sujet mais c’est surtout les petites allusions moins franches qui me faisaient bizarres. Qu'elles soient faites dans une direction comme dans l’autre. Men in Black 3 et Transformers 3 semblent vouloir soutenir l’idée que l’exploit était réel. Alors qu’un film comme Gravity, Prometheus ou Seul sur Mars contiennent des allusions plus douteuses. Mais peu importe, je ne vais pas chercher à faire une liste.

Je voudrais parler ici d’une lecture innocente qui m’a fait un choc: Le Cosmoschtroumpf. J’ai réalisé durant mon adolescence que les Schtroumpfs c’était souvent très sombre et subversif. Le côté enfantin et innocent n’est réellement qu’une surface derrière laquelle il se passe des choses bien plus glauques. Les Schtroumpfs Noirs est un pur film d’horreur du type the Thing, Schtroumpfs Vert et Vert Schtroumpf aborde le racisme avec un désespoir déprimant et La Schtroumpfette explore le problème de la féminité et de la masculinité d’une manière beaucoup plus intelligente qu’il n’y parait.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Le Cosmoschtroumpf, c’est l’histoire d’un Schtroumpf qui rêve d’aller dans les étoiles, sans réelle raison mais de manière obsessionnelle. Il s’emploie alors à construire une machine (une fusée) pour réaliser son rêve.

Alors, que se passe-t-il ensuite ? Le Cosmoschtroumpf s’envole-t-il pour découvrir un nouveau monde magnifique ? L’exploit des Américains a-t-il donné à Peyo une envie irrépressible de rêver, d’explorer les possibilités illimitées soudainement à portée de main de la race humaine ?

Non. Le Cosmoschtroumf reste cloué au sol. Il croyait pouvoir faire décoller sa fusée en pédalant ! Les moyens à sa disposition, aussi impressionnants soient-ils, sont ridicules face aux barrières qui se dressent devant lui.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

L’histoire prend alors une tournure intéressante puisqu’après l’humiliation publique du Cosmoschtroumpf, les autres Schtroumpfs décident d’orchestrer une mise-en-scène monumentale pour lui faire croire qu’il est effectivement allé sur une autre planète.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Ils lui font boire un somnifère, lui demandent de retourner pédaler, déplacent la fusée jusque dans une région volcanique pendant qu’il dort et se changent par magie en une tribu de Schtroumpfs primitifs censés jouer le rôle des extra-terrestres que le Cosmoschtroumpf va rencontrer. Après quelques rebondissements amusants -le Cosmoschtroumpf ne veut pas repartir et les Schlips font tout pour le pousser à le faire- le voyageur décide de retourner sur terre. A son arrivée dans le village des Schtroumpfs il déforme sensiblement l’aventure qu’il vient de vivre, ce qui fait bien rire le lecteur.

La BD est sortie en 1970. C’est la première BD des Schtroumpfs à être parue après l’exploit d’Apollo 11. Je pense que l’on peut affirmer sans prendre de risque que c’est un commentaire direct sur l’événement historique.

Pour Peyo, comme pour beaucoup d’autres, le voyage sur la lune était une simple mise-en-scène. Un certain nombre d’éléments de l’histoire du Cosmoschtroumpf me semblent directement se référer à des éléments réels de la missions Apollo 11.

Tout d’abord, il y a la médiatisation de l’événement. Tout le village est au courant de l’ambition du Cosmoschtroumpf et tout le monde vient assister au lancement de la fusée. John Fitzgerald Kennedy a annoncé dans un discours en 1962 que l’Amérique serait allée sur la lune avant la fin de la décennie, cela comme preuve de la toute puissance du pays. L’exploit a eu lieu en juillet 1969. Ouf, et ben, c’était tout juste, encore un peu et ils se ridiculisaient comme le Cosmoschtroumpf.

L’histoire du voyage sur la lune n’est pas celle d’un pays qui réalise qu’il peut accomplir l’exploit et décide de le faire, mais celle d’un pays qui annonce qu’il va accomplir un exploit pour épater la galerie cela longtemps avant d’en avoir les moyens et qui se retrouve forcé de le réaliser emporté par sa propre glorification. Exactement le genre d’histoire qui mène à un gros mensonge pour éviter d’admettre qu’on a vendu la peau de l’ours avant de l’avoir tué et que l'on est pas du tout aussi balèze qu'on le prétend.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Ensuite vient le simple constat de l’insuffisance technologique. Le Cosmoschtroumpf ne peut pas faire décoller sa fusée en pédalant, c’est ridicule. Du côté des critiques scientifiques de l’opération Apollo, la ceinture de radiation Van Allen est souvent citée comme preuve du mensonge ; même si il y a aujourd’hui une version officielle (qui a mis du temps à venir) expliquant comment les astronautes des missions apollo étaient parvenus à la traverser, Apollo 8, 10 et 11 restent les seules missions à avoir officiellement accompli cet exploit. Donc toutes les missions qui prétendent avoir traversé la ceinture de radiations sont liées au voyage sur la lune. En 2017, aucune autres opérations n'a dépassé cette ceinture de radiations.

Mais au final, c’est surtout la mise en scène des Schtroumpfs qui représente un argument intéressant. L’histoire de l’homme qui marche sur la lune serait une mise-en-scène collective, le résultat d’un accord silencieux entre ceux qui accomplissent et ceux qui applaudissent.

L’une des choses qu’il ne faut pas oublier c’est que si les américains n’étaient pas allés sur la lune, nous serions probablement en pays communiste aujourd’hui (et oui, à un mensonge près on était des camarades dans la misère plutôt que des consommateurs narcissiques). Bon, la fin de la guerre froide ne se résume pas à cet événement (Tchernobyl ?), mais c’est un élément symbolique important qui revient constamment dans la mythologie de la domination Américaine. Dans Forrest Gump, l’homme sur la lune est mis en parallèle avec la guerre du Vietnam et le sport, autres lieux d’affrontement des communistes et des capitalistes. Les Russes aussi se débattaient pour envoyer un pauvre type sur le satellite naturel de la terre.

Sa planète inconnue ressemble quand même à un bon gros tas de merde de vache. Bullshit = Foutaises.

Sa planète inconnue ressemble quand même à un bon gros tas de merde de vache. Bullshit = Foutaises.

Le succès de l’opération Apollo 11 était largement plus politique qu’on ne nous le fait entendre quand on raconte l’histoire aujourd’hui. D’ailleurs, même sans ce contexte historique, l’idée d’un homme qui marche sur la lune est spontanément idéologique, c’est le délire du « quand on veut on peut » qui ignore l’idée que parfois, un but perd son attrait lorsqu’il demande trop de sacrifices. Demandez au petit Maxime 12 ans qui a enfin réussi à se payer le Lego de ses rêves grâce à l’argent qu’il a obtenu en se prostituant. Je sais, cet exemple est sinistre, le truc c’est qu’il contient une réalité que notre culture ignore et qui la ferait s’effondrer si elle devait la prendre en compte. L’idéologie de la volonté inarrêtable est aussi l’idéologie de l’exploitation absolue, et c’est cette idéologie qu’on nous vend avec l’homme sur la lune.

Mais revenons donc à la guerre froide. Si l’exploit d’un homme sur la lune était en réalité l’exploit d’un Américain sur la lune par opposition à un Russe, oser proférer l’idée que c’était un gros mensonge revenait à donner la victoire à la Russie. Or, on pouvait très bien ne pas croire en l’exploit des américain et néanmoins être de leur côté. Croire ou ne pas croire devenait donc un acte d’engagement politique, comme toujours de toute façon.

Ainsi, le voyage du cosmoschtroumpf est un voyage parmi les Schtroumpfs. Peut-être même est-ce l‘acquittement d’une dette car ce sont les habitants du village qui ont mis leur nez dans l’histoire du cosmoschtroumpf. A la base, lui, il fait les choses en cachette. L’humiliation publique de l’échec est entièrement la faute du groupe, pas du Schtroumpf (en tout cas en apparence). Il n’est donc pas illogique que les Schtroumpfs puissent se mettre en quatre pour se faire pardonner : « Tu n’es pas allé sur une autre planète mais pour nous tu y es allé. »

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

A quoi se résume par conséquent le voyage du Cosmoschtroumpf ? Que découvre-t-il ? Rien. Il ne ramène rien ni ne découvre rien, il rencontre juste un équivalant primitif des habitants du village et se donne le droit de se moquer du grand Schtroumpf. Son voyage est un voyage dans la hiérarchie sociale des habitants du village. Le reste ne compte pas. Cherche-t-il à découvrir de nouvelles plantes, de nouvelles roches, de nouvelles formes de vie ? Absolument pas. Tout se passe au niveau de sa relation avec les autochtones/habitants du village. (Exactement comme dans Seul Sur Mars).

Lorsqu’il décide de rester avec ces Schtroumpfs primitifs, les Schlips, évidemment ceux-ci le poussent vers la sortie en prétendant qu’il doit passer des épreuves particulièrement difficiles pour s’intégrer à la tribu. La BD s’amuse pendant quelques pages du fait que le Cosmoschtroumpf parvienne à passer ces épreuves, jusqu’à ce qu’on lui demande grosso modo de devenir l’esclave de la tribu. Il décide alors de repartir.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)
Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Le Cosmoschtroumpfs repart donc une fois qu’il a prouvé ses capacités et talents et dès qu’on lui demande de mériter son intégration en montrant ce qu’il peut réellement apporter à la tribu. De retour au village, il raconte son voyage de manière déformée. Le peuple Schlips l’a pris pour un Dieu, le Schlips qu’il a combattu était gigantesque, il est revenu parce que son village lui manquait…

Ainsi, le voyage du Cosmoschtroumpf est une affirmation de sa supériorité. Les autres Schtroumpfs acceptent de céder à son caprice soit parce que son échec leur fait de la peine, soit parce qu’ils savent que c’est à cause d’eux qu’il s’est ridiculisé. En attendant, ils se ridiculisent eux-mêmes à leur tour et acceptent donc de se faire les complices de sa démonstration de supériorité.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)

Il est très facile de voir que l’histoire officielle du premier pas sur la lune pourrait ne pas être différente de celle du Cosmoschtroumpf. Il était techniquement parfaitement possible de construire une fusée, de la faire décoller, de récupérer les pilotes dans un océan quelconque quelques heures plus tard, de simuler l’intégralité du voyage et de produire en studio les images de l’alunissage. Au-delà de la naïveté générale des peuples, c’est également le positionnement politique qui aurait soutenu le mensonge et l’on sait que l’Amérique était platement fasciste à cette époque pour ce qui avait affaire à la chasse aux communistes. Dire que le premier pas sur la lune était une mascarade n’était pas synonyme d’être mal vu, mais plutôt de licenciement, d’arrestation et de probable déportation (si interprété comme un indice de sympathies communistes).

Ainsi, l’Europe aurait donnée aux Cosmoaméricains l’occasion de prouver leur valeur et leur supériorité symbolique en participant à une mascarade titanesque qui a façonné le monde tel que nous le connaissons aujourd’hui. Un monde qui fonctionne sur la façade, la surface et le vide derrière celles-là et repose sur l'idée que le peuple américain est supérieur à tous les autres.

Évidemment, vous pouvez lire entre les lignes de ce texte que je ne crois plus que les américains soient allés sur la lune. Cependant ce n’est pas ce que je cherche à dire ou à prouver ici, ce que je cherche à souligner c’est que la BD des Schtroumpfs qui date de 1970, la première après l’exploit historique, est une BD qui raconte comment le voyage d’un Schtroumpf sur ce qu'il croit être la lune est en fait une mascarade généralisée et que l’on peut tout de même se dire que le but de Peyo était de pousser à la remise en question de l'événement historique réel. 


Ensuite, on peut jeter un œil au premier James Bond à avoir été projeté dans les salles de cinéma après le premier pas sur la lune : Diamonds Are Forever (1971). Un James Bond dans lequel notre héros visite une base secrète dans le désert et découvre… un plateau de tournage avec cosmonautes et décors lunaire.

Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)
Le Cosmoschtroumpf: Le Cosmoschtroumpf n'est jamais allé sur la lune. (2000 mots)
Ce figurant vous donne même le vocabulaire nécessaire à une critique de la version officielle.

Ce figurant vous donne même le vocabulaire nécessaire à une critique de la version officielle.

Vous pensez qu’il ne faut pas prendre un film de divertissement populaire si sérieusement ? Je pense qu’au contraire le cinéma populaire qui est par définition le cinéma qui touche le public le plus large, est nécessairement un cinéma extrêmement politique et sérieux. Le film ou la BD d’une franchise appréciée qui suggère une vision critique d’un événement officiel important ne le fait pas pour rigoler. Cela signifie-t-il qu'il faut prendre leur version pour argent comptant ? Non, mais ça ne signifie pas non plus qu'on peut honnêtement disqualifier leur discours d'un revers de la main.