Beverly Hills 90210 S1E3 : Tiffany détruit la relation de Brenda avec sa mère. (2200 mots)
La mort de Shannen Doherty (Cancer à 52 ans pas la peine de se demander ce qu’elle s’est fait injecter en 2021) nous a donné envie, à moi et à ma compagne, de jeter un œil à la série Beverly Hills, pour le fun. Nous avions regardé Melrose Place pour retrouver la Georgia d’Ally McBeal.
La série ne m’avait jamais intéressé lors de sa diffusion dans les années 90 et je n’en gardais que peu de souvenirs, si ce n’est ceux d’un enthousiasme creux, d’une légèreté fade, de bons sentiments dégoulinants, d’acteurs qui en rajoutent et d’un sentiment d’ennui généralisé.
Cependant, après avoir vu le pilote ainsi que les deux premiers épisodes, je dois dire que Beverly Hills est bien plus intéressant que je ne le pensais. Je n’irais pas jusqu’à regarder la série par simple intérêt mais je mentirais si je prétendais que je ne me suis pas trouvé agréable surpris voire impressionné par les dynamiques décrites dans ces épisodes.
L’épisode 3, « Every dream has its price (tag) » dépeint magnifiquement l’effondrement des liens entre Brenda et sa mère sous l’influence de la ville maudite.
Ce qui m’impressionne ici, c’est la manière dont la série nous montre l’échec des bons sentiments.
Brenda traîne avec Kelly, Donna (la muette) et Tiffany. Elle se plaint de ne pas avoir de beaux vêtements et considère que ça l’empêche de s’intégrer.
En classe, la prof aborde les misérables et les 20 ans de prison de Jean Valjean pour avoir volé du pain pour nourrir sa famille.
Brenda lui demande s’il est pire de voler pour une bonne raison que de désirer voler pour une raison futile, un truc comme ça. On comprend qu’elle envisage de voler les vêtements qu’elle ne peut pas se payer.
Cependant, elle ne le fera pas, contrairement à son amie Tiffany qui vole sans scrupule, sans hésitation et sans crainte.
Lorsqu’elle se fait prendre, Brenda est impliquée et ses parents vont donc devoir se demander s’ils pensent que leur fille a volé des vêtements. Le père s’en contrefout. La mère croit bien rapidement que Brenda a commis le délit.
Et c’est le problème. Brenda n’a pas volé. Elle a tenu, elle a pris sur elle parce qu’elle voulait rester digne de ses parents et digne d’elle-même. Le fait que sa mère la croit coupable si rapidement représente un choc et un traumatisme important. Brenda le dira en conclusion d’une sérieuse dispute : « Si tu crois que j’ai volé ces vêtements, tu ne sais pas qui je suis. »
On parle ici de dynamique profonde, de confiance et d’amour. Ce qui importe le plus pour être quelqu’un de bien, c’est d’être entouré de personnes qui comprennent notre valeur et nos principes. C’est ce qui construit un lien, une communauté, une société. Si les gens sont rapidement prêts à nous percevoir comme sans valeur, sans principe, sans morale, cela devient très rapidement un désavantage d’avoir des principes et de la morale. C’est la raison pour laquelle les gens qui traitent tout le monde à égalité détruisent en fait tout sur leur passage. Lorsqu’on pardonne un menteur et qu’on le traite virtuellement aussi bien qu’une personne honnête, on ne l’encourage pas à devenir honnête, on récompense sa malhonnêteté, on efface ce qui devrait le pousser à devenir honnête et on punit l’honnêteté de l’autre personne.
Nous en sommes au troisième épisode de la série et déjà Beverly Hills endommage gravement la relation de Brenda avec sa mère.
Spontanément, les spectateurs s’imagineront (probablement) que Tiffany vole pour les mêmes raisons que celles qui poussent Brenda dans cette direction : le manque d’argent. Mais nous apprendrons plus tard dans l’épisode, que c’est l’absence de ses parents qui pousse Tiffany à la cleptomanie. Elle peut parfaitement se payer ces vêtements. Kelly apporte des éléments sur la question en expliquant à Brenda que Tiffany lui a « volé » Steve non pas parce qu’il lui plaisait mais parce que l’idée de le prendre à Kelly lui plaisait.
Kelly a déjà plusieurs traumatismes lorsque la série commence. C'est une "ancienne moche" qui en plus, s'est faite voler le garçon qu'elle aimait. Il est probable que ce soit de la faute de Tiffany que kelly se fait refaire le nez.
On voit que Tiffany a de sérieux troubles psychologiques. La série va même plus loin en sous-entendant qu’elle a une vie sexuelle complètement dissolue. Brenda lui demande qui sont les deux hommes allongés sur des transats près de la piscine, Tiffany lui répond : « c’est juste deux mecs qui utilisent les lieux » « the premises. » Le jeu de l’actrice suggère clairement qu’elle aussi est « utilisée. »
Et donc, ce qui m’a impressionné c’est que tout en offrant un pseudo happy end à l’épisode, la série suggère en réalité le pire.
Le happy end, c’est que Tiffany vient se dénoncer chez les Walksh, la vérité est révélée et l’emporte.
Mais cette victoire de la vérité n’est, en réalité, pas positive et ça, ça me sidère. Je trouve cela très élevé intellectuellement, dans ce contexte, de comprendre que la vérité est utilisée à de sinistres desseins, qu’elle ne sauve pas la situation.
D’ailleurs, la morale et la gentillesse de la mère de Brenda sont également catastrophiques, dans le contexte et cela également suggère un niveau de compréhension des dynamiques humaines réelles assez admirables.
La vérité pose problème car, en venant se dénoncer, Tiffany enlève à Brenda l’opportunité de constater que sa mère finirait par comprendre, par sentir, que jamais sa fille n’aurait volé. Le choc d’un événement désoriente et l’on peut se tromper sur une personne que l’on croit connaître avant de retrouver notre perception originelle. Mais là, les aveux de Tiffany scellent à tout jamais le fait que la mère de Brenda l’a prise pour une voleuse alors même que sa fille affirmait son innocence. C’est fini, la petite Brenda innocente est morte. Même si la situation se reproduisait, la confiance de sa mère ne vaudrait plus rien pour elle, qui d’ailleurs pourrait bien se mettre à voler.
Et les choses vont plus loin car Tiffany a dissimulé des vêtements volés dans la chambre de Brenda, fabriquant donc une preuve de la culpabilité de son amie. C’est odieux et ça ne lui fera aucun tort.
Cindy (la mère de Brenda) va faire une petite leçon de morale (idiote) à Tiffany mais ne sera pas choqué par l’ignoble manipulation qui a fait passer sa fille pour une voleuse. A la place, elle se met en position de gentille maman compréhensive… justement parce qu’elle se sent inutile à Beverly Hills. Sa gentillesse et sa compréhension sont ici, en vérité, profondément égoïste.
Et Tiffany obtient ce qu’elle veut, comme avec Steve, elle vient de voler à Brenda la confiance de sa mère. Cindy lui donne son absolution, la materne, lui donne des conseils etc etc et à aucun moment elle ne prend la défense de sa fille.
Tiffany s'expose devant la caméra de David parce qu'elle "sait ce que les hommes veulent réellement voir."
D’ailleurs à aucun moment elle ne reconnaît que peut-être que si Brenda voulait tant ces nouveaux vêtements hors de prix, c’était pour de bonnes raisons.
Plus tôt dans l’épisode elle lui fait une leçon de morale sur les apparences et sur le fait que si les gens se soucient de la manière dont tu t’habilles c’est qu’ils ne tiennent pas réellement à toi, ce genre de chose. Elle se fiche bien que Brenda galère horriblement. Elle sous-estime la misère relationnelle dans laquelle se trouve sa fille.
Détail hilarant, elle suggère à Tiffany de rechercher l’attention de ses parents de manière directe plutôt que de voler, de faire des bêtises. Comme si devenir une clepto-nymphomane était la première chose qui était venue à Tyffany pour attirer l’attention de ses parents. Cindy Walsh est une imbécile.
Mais donc, je tenais à mettre en avant cette jolie description nuancée de la manière dont la douleur d’une personne et surtout, la bienveillance naïve, peuvent mener à la destruction d’une autre personne.
Brenda va mal, sa mère ne comprend pas son problème, ne cherche pas à la comprendre ou à l’aider, mais se montre tout-à-fait prête à la voir se corrompre pour se soulager de ce problème.
Elle échoue à tous les niveaux dans son rôle de soutien et de compréhension de sa fille.
Mais pire encore, elle va accorder à Tiffany de lui donner la même place symbolique qu’à Brenda en se préoccupant des problèmes de cette jeune fille. Elle ne lui dira pas « de quel droit tu fais passer quelqu’un comme Brenda pour une voleuse ! A cause de toi je me suis montré indigne de la confiance de ma fille ! Espèce de petite salope ! De quel droit est-ce que tu cherche à foutre la merde dans la vie des autres ? »
Tiffany la voleuse menteuse, manipulatrice pervers vient présenter ses excuses et admettre qu'elle est la coupable de tout.
Elle va même jusqu'à conseiller à la mère de Brenda de ne pas laisser sa fille trainer avec une personne comme elle.
L'autre idiote complètement fascinée ne mesure absolument strictement rien de la gravité de la situation et va lui donner la réponse évidente: "Tu es probablement une meilleure personne que tu le penses." Comme si c'était la question. Comme si c'était le problème. Où est Brenda ? Qu'advient-il de ta fille pauvre andouille !
Cindy ne ressent aucun besoin de faire comprendre à Tiffany ce qu’elle a détruit ou endommagé. Aucune menace du type « ne t’avise jamais de refaire un sale coup à Brenda ou bien je te pris de croire que tu le regretteras. »
Rien. Brenda n’est pas sacrée. Elle est au même niveau que Tiffany. Sa supériorité morale, qui lui vient de son éducation, du cocon familial dans lequel elle a eu la chance d’être élevé, tout ça ne compte pas.
C’est une dynamique qui passe souvent à la trappe dans notre culture.
Très souvent, nos jugements sont du type : la personne qui a de la chance ne mérite pas de compassion. La personne qui n’en a pas mérite le soutien et la compassion.
Et réellement, platement, à un degré abyssalement stupide, les personnes qui ont une vie saine et équilibrée, vont payer pour cette chance, pour cet équilibre, pendant que les personnes qui font n’importe quoi, ou se conduisent mal, obtiendront (si elles avent y faire) un soutien du fait qu’elles font n’importe quoi ou se conduisent mal. L'idée étant que les gens qui se conduisent mal le font parce qu'ils souffrent ou qu'ils n'ont pas eu la chance d'avoir une éducation correcte, ce qui est parfaitement vrai mais ne rend pas fonctionnelle une logique de récompense de la médiocrité. On ne peut pas récompenser la bassesse et punir la valeur et espérer créer plus de valeur et combattre la bassesse.
L’histoire de cet épisode montre bien les limites de la compassion. Il ne fait aucun doute que Tiffany va très très mal et que Brenda a accès à quelque chose de primordial à quoi Tiffany n’a pas accès. Tiffany la riche n’est pas la chanceuse de l’équation.
Mais cela ne rend en aucun cas acceptable qu’elle tente de gâcher pour les autres, cedont elle est privée.
Cindy finit par se plaindre elle-même. Summum de médiocrité parentale "Moi aussi zai des problèmes !!! Et si tu veux parler des tiens alors tu devras écouter les miens aussi !!""
C’est une dynamique très présente dans notre culture. Les gens qui souffrent d’un manque, peuvent avoir tendance à vouloir priver les autres de la même chose et lorsqu’on ne s’oppose pas à ça, on accepte que la société s’effondre.
Si tous les enfants dont les parents sont séparés ont le droit de harceler ceux qui ont la chance d’avoir une famille unie, on accepte donc que l’aliénation de tous est la voix à suivre. L'agression jalouse devient la loi.
Cette équation est encore plus facile à dépeindre avec des jouets.
Imaginons que deux enfants veulent la même boîte légo pour noël. L’un se la voit offrir, l’autre non. Que va-t-il se passer ? Celui qui ne l’a pas eu va souffrir, sera jaloux et risque de vouloir priver l’autre de sa chance. C’est un phénomène fréquent.
Si l’on considère acceptable la violence qui pourrait s’en suivre, on suggère donc à l’enfant qui a eu le jouet qu’il désirait, qu’en fait, il ne le méritait pas. Que rien n’est jamais à lui, qu’il doit offrir sa compassion perpétuelle à tout le monde et ne jamais profiter de ce qu’il tire de l’existence sous prétexte que ça n’est pas accessible à tout le monde. Cela ne mène qu’à l’auto-destruction des uns et à la légitimité de l'agression et du vol.
La vérité, c’est que nous devons tous apprendre que nous n’aurons jamais tout ce que nous voulons et qu’il faut avoir la force d’accepter nos souffrances plutôt que de les faire payer aux autres. Une leçon qui n’est pratiquement jamais enseignée dans la société de consommation.
Tiffany souffre horriblement, elle a besoin d’aide, d’amour et de compassion, mais ce qu’elle inflige à Brenda est très grave. Elle ne devrait pas obtenir la compassion de la mère de sa victime.
A la fin de l’épisode, elle a gagné.
Brenda pour qui voler était « le pire crime » (elle prononce le mot « pire » « you think the worst of me »), voit la personne qui l’a fait passer pour une voleuse aux yeux de ses parents être pardonnée et soutenue par sa mère.
Donc, une chose qui compte profondémment pour Brenda identitairement, qui la définit, qui fait sa fierté, son sentiment de valeur morale, n’a en fait aucune importance pour sa mère. A la fin de l’épisode, Brenda a encaissé que sa valeur morale n’a pas d’importance pour ses parents et par conséquent qu’elle-même n’a pas d’importance par rapport à son opposé. Si l’on n’est pas aimé pour notre valeur, alors pour quoi le sommes nous ?
Tiffany a bien volé ses parents à Brenda. Et probablement est-elle également parvenue à soumettre Brenda qu’elle jalousait. Perversion narcissique manipulatrice.
Bref, ces premiers épisodes de Beverly Hills sont bien sombres et profonds.
Tout est bien qui finit bien... ou plutôt "tout est bien lorsqu'on a perdu espoir de rattraper les tragédies."
J’ai l’impression qu’en parallèle Brandon perd son respect pour son père qui se vante d’avoir toujours travaillé pour gagner sa vie alors que l’expérience que Brandon fait du monde du travail est abominable sans savoir qu’elle est très différente.
Le pilote tourne autour de la manière dont la sexualité des deux jumeaux va être aliénée. Leur arrivée à Beverly Hills fait clairement exploser leur libido mais en font également des proies pour les vampires de la ville.
Le traumatisme des deux sera de produire le comportement exactement inverse de ce qu’ils sont.